En janvier 2018, Alain Devaquet, ancien Ministre délégué chargé de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche scientifique s’est éteint à l’âge de 75 ans. Il a été en 1986 l’initiateur d’une loi portant réforme de l’Enseignement supérieur, farouchement contestée par les étudiants et futurs étudiants de l’époque. La loi Devaquet est restée dans les annales des universitaires, comme l’une des dispositions gouvernementales ayant rameuté le plus de contestataires depuis mai 1968.

Historique de la loi Devaquet

La loi Devaquet a été imaginée à une époque où les universités françaises souffraient d’une surpopulation, tout en étant dépréciées par les élèves les plus méritants, préférant payer plus cher au niveau des grandes écoles. Du moins, c’était le constat du Gouvernement d’antan qui décide alors de réorganiser les universités dans leur structure. Après avoir confié l’étude de la réforme à une plateforme, l’UNI, lequel a élaboré une première proposition jugée trop radicale, le Gouvernement a alors fait appel à son Ministre de l’enseignement supérieur, Alain Devaquet, pour pondre un autre projet de loi portant son nom.

En juillet 1986, validée en Conseil des Ministres, la loi Devaquet est en passe d’être étudiée au niveau de l’Assemblée nationale. Mais son contenu a créé un grand tollé des futurs nouveaux étudiants, lesquels décident d’envahir les rues. Courant les mois de novembre à décembre de la même année, de violentes manifestations se sont soldées par la mort d’un étudiant. La proposition de loi fût vite retirée de l’ordre du jour du Parlement, pour rester dans le tiroir des dirigeants de l’époque.

Ce que propose la loi Devaquet

La loi Devaquet a été élaborée en collaboration avec le Ministère de l’Éducation nationale dirigé par René Monory, et a été censée abroger la loi Savary, dispositif en place régissant la réforme de l’enseignement supérieur mise en place vers la fin des années 1960, qui instaurait alors des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel. La loi Devaquait voulait instaurer, à la place, des établissements publics d’enseignement supérieur. Mais dans le cadre de ce changement de statuts, 3 autres points cruciaux provoquaient l’ire des lycéens et des étudiants affirmant l’autonomie des organismes universitaires:

  • la faculté pour les universités de fixer elles-mêmes les tarifs des inscriptions en premier cycle, ce, dans un cadre de référence nationale
  • la liberté pour ces mêmes universités d’établir les modalités d’accès, en considérant entre autres critères le niveau du nouvel étudiant
  • la possibilité pour le campus de choisir sa pédagogie et d’établir leurs diplômes sous certaines conditions en matière d’accréditation

Ces dispositions qui instauraient de fait le caractère très sélectif de l’accès aux universités ont conduit la population lycéenne soutenue par les étudiants à se mettre en grève. En outre, lors des concertations visant la création de la loi, les principaux concernés ont été mis à l’écart, au profit des seuls enseignants-chercheurs. Ceux-ci bénéficiaient même d’une place prépondérante au sein du cercle dirigeant des universités (65% des postes).

Loi Devaquet : resté au stade de projet

Durant les deux derniers mois de 1986, les contestations des étudiants ont fait rage. Dirigés par leurs syndicats, ils avançaient leur crainte de l’application de tarifs prohibitifs dans certains établissements élitistes. Ils appréhendent aussi que la sélection à l’entrée des universités ne soit une stratégie pour fermer les portes des universités aux lycéens ayant de moins bons résultats scolaires. En même temps, les contestataires estiment que la loi Devaquet va créer un système universitaire à deux facettes, où des étudiants sortants des universités élitistes seraient plus avantagés avec des diplômes plus appréciés par les entreprises (sachant que les enseignants y seront aussi meilleurs, mieux payés). Tandis que des universités modestes sortiront des étudiants de niveau moins adapté à ce que recherchent les entreprises…
Un bon nombre de justifications ont été scandées par les manifestants pour mettre fin au débat sur la loi Devaquet et la mettre aux oubliettes. Mais ce qui a sonné le glas à ce dispositif était le décès de l’étudiant dénommé Malik Oussekine, tabassé à mort par les forces de l’ordre. D’autres violences de la part de contre-manifestants ont amené Alain Devaquet à démissionner de son poste. Sa loi a officiellement été abandonnée le 8 décembre 1986.

La loi Devaquet aujourd’hui

La loi Devaquet manque donc de réformer la loi nationale sur l’éducation et l’enseignement supérieur. Elle laisse sa place à la loi Savary qui constitue, en grande partie, les grandes lignes du Code de l’éducation nationale. Publié au début des années 2000, celui-ci regroupe presque toutes les dispositions législatives et réglementaires concernant l’éducation et les structures universitaires.

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